Pendant près de 3 ans de guerre totale, de 1939 jusqu’aux environs de 1942, la Kriegsmarine a régné sans pitié sur l’Atlantique jusqu’à atteindre les côtes Américaines et à mettre à mal le ravitaillement Britannique. Mais cette réussite se base certes sur une flotte solide avec des navires imposants comme le Tirpitz et le Bismarck, mais aussi sur des sous-marins U-Boots ou bien des yachts à moteur armés, les Schnellboot. Il faut de tout pour faire une armée et les S-Boots sont la preuve que même les plus petits peuvent être d’une bonne utilité et aider les plus grands navires à atteindre leurs objectifs.

Nous allons justement dans cet article prendre moins de hauteur et nous intéresser a ses petits bateaux à peine plus grand qu’une péniche de plaisance qui ont été armés pour servir les intérêts de son pays et en faire des armes de guerre.

Le Vedette Lance-Torpille

Pas plus grand qu’un bateau classique, les vedettes lance-torpilles ont vu le jour chez les Italiens et les Britanniques. Il s’agit donc de petits yachts à moteur armés opérant dans les eaux côtières disposant de bonnes qualités manœuvrières à très grandes vitesses pour s’approcher des bâtiments ennemis et lancer sur eux leurs torpilles ou installer des mines. Ils sont donc armés et équipés pour la guerre. Cette vedette fait encore l’objet de tests et d’acclimatation à ce moment, mais il souligne déjà de nouveaux enjeux et de nouvelles opportunités de changer la manière dont on fait la guerre.

Image générée par l’IA

Due à la modernisation et aux nouvelles technologies des marines d’Europe, l’Allemagne entreprit aussi des programmes de développement pour constituer des flottilles de vedettes lance-torpilles capables d’effectuer des missions de patrouille et d’attaque. Pour sa sécurité, elle se doit de se munir à nouveau d’une marine fiable.

Pour l’Allemagne, les vedettes sont appelées les Schnellboot « Bateau Rapide » / « Bateau Express » ou appelé par les Alliés E-Boot (ennemi). Ils sont connus principalement pour avoir servi dans la Kriegsmarine (marine de guerre Allemande), ou bien en Espagne qui récupéra les premières quelques vedettes sorties d’usine. Ce type de bateau est utilisé pour défendre comme pour attaquer des bâtiments ennemis ou marchands et poser des mines, mais surtout pour défendre les eaux bordants son port de rattachement ou une zone maritime définie.

Que dit le Traité de Versailles à propos des navires allemands ?

Interdit par le Traité de Versailles, la production allemande industrielle de guerre se voit contrainte de produire que de très petits bateaux pour sa marine et empêche la constitution d’une nouvelle flotte pour sa capacité offensive et défensive. Elle ne peut pas prétendre à retrouver sa force d’antan et posséder une flotte importante à côté des pays vainqueurs.
Dépourvu de créer des gros bâtiments et de pouvoir reconstituer une flotte conséquente, les caractéristiques des S-Boots ont attiré l’intérêt de la marine allemande, qui a ordonné en 1929 la construction d’un navire similaire mais avec des tubes lance-torpilles…

Ayant très peu d’options, les vedettes lance-torpilles bénéficient d’un coup de projecteur à cette époque qui les feront entrer dans la Kriegsmarine pour de bon.

1930, les Schnellboot voient le jour

Suite à ça, l’Allemagne invente à ce moment sa propre vedette lance-torpilles nommé S-Boot « Schnellboot » qui entrera en service en 1930. Le premier modèle se nomme S-1, à l’image des U-Boots (U-1, U-2…) et de sa dénomination simpliste et efficace. Il sera le premier d’une longue lignée de S-Boots qui participeront activement à la Seconde Guerre Mondiale. Dans les années 1930 ensuite, la Kriegsmarine allemande améliore et adapte les S-Boots en concevant les célèbres torpilleurs à moteur de classe S qui résultera a la mise à l’eau de plus de 230 S-Boots durant toute la guerre de toutes classes.

Ces petits bateaux peuvent paraitre facilement destructibles ou des cibles faciles comme ils ne disposent d’aucun blindage. Mais la réalité n’est pas tout à fait celle qu’on croit, car leurs protections et leurs avantages contre les tirs ennemis résidaient dans leur vitesse et leur manœuvrabilité. Ils étaient équipés de gros moteurs 16 à 20 cylindres capable de leur apporter une maniabilité importante pour esquiver d’une part les balles et les éventuelles torpilles tirées très près du S-Boot. On note une vitesse maximale de plus de 73 km/h pour la dernière classe 1939/1940 de S-Boots !

L’élément important aussi à retenir sur les Schnellboot est qu’étant donné que les bateaux de cette taille sont rapides et armés, les croiseurs, destroyers ou cuirassés ont beaucoup de mal à les détruire. Là les S-Boot ont l’avantage et peuvent sans problème tirer les torpilles qu’ils possèdent sur le bateau et détruire les bateaux alliés.

Yacht à moteur armé d’équipements de navires de guerre et de sous-marins pour le combat

Un équipage d’une trentaine d’hommes occupaient les fonctions vitales de l’embarcation (défenses anti-aériennes, armement des torpilles, pilotage, commandement…). Cet équipage était similaire à celui des autres navires allemands malgré une spécialisation des marins obligatoire. Ils étaient la plupart du temps en observation et à l’instar des U-Boots, devaient agir rapidement une fois repérés.
La conception a été choisie en tenant compte de l’environnement dans lequel elle allait évoluer principalement dans la mer du Nord et la Manche. Il n’était pas possible et envisagé de les faire combattre autre part, de part la complexité de leur transport et de par leur utilisation restreinte.

Le S-Boot possède une structure en bois avec un renforcement métallique qui solidifie l’ensemble. L’armement quant à lui reste intéressant, avec 2 tubes lance-torpilles sur les flancs avants avec deux chambres pour le rechargement des torpilles. On y trouve un peu à l’arrière plusieurs canons antiaériens pour assurer la défense des hommes et du Schnellboot contre les avions ou les bâtiments proches hostiles. Il dispose aussi parfois d’autres armes, comme des mines (4 LMF (charge de 290 kg) / UMB (charge de 40 kg) ou 6 LMB (mines magnétiques) /TMB (mines à effet de sol))1. Il s’agit donc d’un navire conçu pour approcher et affronter les navires, contrairement aux sous-marins U-Boots qui préfèrent se cacher, tirer et quitter sa position sans risquer un contact direct.

Dans les versions à partir du S-100, une partie protégée et une plateforme de contrôle blindée a été ajoutée pour protéger l’équipage des attaques aériennes, en plus des défenses triplées (3 canons), permettant à l’équipage de se cacher en cas d’attaque.

NB : Sa vitesse est très supérieure aux autres bateaux. Par exemple le Bismarck (cuirassé allemand) allait à une vitesse de 53,7 km/h. 

Réalisation de Theo Peter (1:72 Revell)

Type de bâtiment minoritaire dans la Kriegsmarine

Les vedettes lance-torpilles ont participé à beaucoup de théâtres d’opérations durant la Seconde Guerre Mondiale. Au début, seulement 18 S-Boots étaient en service actifs, puis plus de 230 S-Boots participeront au conflit dans diverses opérations.

Cependant, les petits yachts à moteur restent très négligés dans son amélioration et son adaptation aux réalités du combat, au profit des U-Boots ou des navires plus larges, beaucoup plus efficaces. On dénombre plus de 1154 U-Boots produits contre moins de 300 pour les S-Boots, sans compter les autres types de navires sortis d’usine (destroyers, croiseurs…). Par rapport aux autres forces vives, leur impact reste très minoritaire et relève du détail, ils ont par ailleurs été construits et fabriqués exclusivement par la société Lürssen à Vegesack (Allemagne). Ne possédant pas suffisamment d’équipements modernes comme le radar ou le sonar, ils n’ont pas pu véritablement s’imposer face aux attentes de la guerre.

Participer à la « guerre de tonnage »

Leur but était le même que le reste de la Kriegsmarine, qui était de détruire un maximum de ravitailleurs et de navires marchands Américains en direction de la Grande Bretagne, affrété pour soutenir l’effort de guerre allié sur le territoire européen. Dans l’effervescence du début de la guerre par ailleurs, l’objectif était de détruire autant que possible l’aide Américaine et Britannique vers l’Europe en la supprimant directement dans la mer. C’est une « guerre de tonnage » destinée à couler plus de navires que les Alliés ne pouvaient en remplacer. Il était crucial de détruire le plus possible et ne rien laisser passer sont les facteurs déterminants pour le succès.

Dû à cette négligence, tous les S-Boots partageaient la même conception de base, la même propulsion et le même armement. Mis à part le moteur qui peut différer (MAN / Daimler-Benz), aucun élément marquant à l’image du U-Boot de type XXI révolutionnaire n’a vu le jour chez les S-Boots.

On notera tout de même une prise de conscience pendant la guerre, résultant en la création de la classe 1939/1940 et ses 213 bâtiments qui permirent de faire des dégâts considérables. Un autre aspect souvent ignoré est que les S-boots étaient largement employés dans des missions de mouillage de mines à travers les mers. En réalité, la majorité de leurs opérations consistaient à poser des mines, mais en raison de leur capacité limitée à transporter seulement six mines à la fois, ces missions n’ont rencontré qu’un succès restreint limité, qui ne se limita qu’à quelques pertes et une prise de risque non négligeable lors du mouillage.

John Hoagland’s Gallery, cornucopia3d.com

L’efficacité des Schnellboot en chiffres  

Au cours de la 2GM, les Schnellboot n’ont pas forcément marqué le conflit, mais leur efficacité a pu se compter en milliers de tonnes de marchandises détruites.

On dénombre la destruction des bâtiments suivants par les S-Boots de 101 navires marchands totalisant 214 728 tonnes, de 12 destroyers, de 11 dragueurs de mines, de 8 navires de débarquement, de 6 vedettes de combat, d’1 torpilleur, d’1 mouilleur de mines et d’1 sous-marin  !

Les mines marines posées par les S-Boot ont été responsables de la perte de 37 navires marchands totalisant 148 535 tonnes, d’1 destroyer, de 2 dragueurs de mines et de 4 navires de débarquement.

Cependant, ces chiffres restent relativement bas et il a été estimé qu’à cause d’un manque de développement et un manque d’efficacité des moteurs, on dénombrerait pas moins de 115 000 tonnes de marchandises qui n’ont pas pu être détruites. Plusieurs S-Boots furent réutilisés par d’autres marines dans le monde après la guerre, et deux d’entre eux furent intégrés à la nouvelle Bundesmarine en 1957 pour compléter les rangs.

  1. http://www.navweaps.com/Weapons/WAMGER_Mines.php ↩︎


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