L’Opération Eiche, le sauvetage éclair de Mussolini

Histoire

La politique est bien une science étrange. Entre chefs d’Etats qui ont des intérêts divergents, tout est calculé, millimétré pour ne rien laisser paraître. Par contre, entre chefs d’Etats ayant des points communs, la relation est beaucoup plus facile et parfois, la relation va plus loin que seulement diplomatique. Cette idée de relation forte peut se montrer en celle d’Hitler de Mussolini avant et pendant la Seconde Guerre Mondiale. Leur relation, semblable à une querelle de pouvoir et d’empathie, prendra un tournant lorsque Mussolini se fait emprisonner après le renversement du pouvoir fasciste en Italie en juillet 1943. Fait marquant dans l’histoire, Hitler prendra la décision d’aller sauver Mussolini et le réinstaller sur le trône de ce qui reste de l’Italie. Ce sauvetage se nomme « l’opération Eiche » ou il est également connu comme le « grand raid au Gran Sasso ».

Nous allons explorer comment ce sauvetage expresse du dictateur italien a eu lieu et en quoi elle montre la relation Mussolini-Hitler particulièrement intéressante dans une Europe en guerre. Elle a certes marqué l’histoire de l’Italie, mais montre aussi tout l’étendue du fanatisme d’Hitler et sa volonté de contrôler son confrère italien, qu’il sent vaciller très fortement.

L’entre-deux-guerres, un terreau fertile pour l’expansion des extrêmes

Il est clair que dans l’Europe devenue démocratique d’entre-deux-guerres beaucoup de choses ont évolué. La situation s’est certes tassée en apparence, elle pose quand même de grandes questions dans les pays qui subissent et ne reprennent pas le cours normal des jours de la fin de la Première Guerre Mondiale.

On imaginait alors plus jamais qu’une guerre aussi cruelle comme la Première Guerre Mondiale pouvait revenir et que tout serait terminé, que personne n’oserait tenter à nouveau la guerre de position et des tranchées. Cette fin de guerre a également apporté le Traité de Versailles, ratifié et provoqué par les nations vainqueurs contre l’Allemagne qui doit désormais payer le prix de cette guerre qui a dépassé toutes les attentes.

US National Archives

Les conséquences du traité de Versailles

Ce traité étant très punitif pour la grande perdante de cette guerre, il en fallait peu pour que le totalitarisme et les extrêmes montent dans les sondages et deviennent véritablement une « solution », à l’instar de la démocratie. Economie en baisse, honneur bafoué, acculé par les dettes et les coûts de réparation colossaux, une armée réduite à 100 000 hommes maximum et d’infimes chances de reconstruction rapide ont fait de l’Allemagne un gouffre sans précédent et profondément dépendante de tous les pays avec qui elle doit composer.

Cette instabilité et ce traité a profondément marqué toutes les classe sociales allemandes, de l’ouvrier à l’homme d’Etat. Cette crise touchait tout le monde et les politiques de l’époque n’avaient pas de solutions aussi radicales pour répondre à la situation. De ce constat de désolation et de problématiques impossibles à résoudre, ce fut un terreau fertile d’expansion d’idéaux favorables à Hitler et à Mussolini qui parviendront à atteindre le pouvoir de leur pays, Mussolini en 1922 et en 1933 pour Hitler, qui accède au pouvoir grâce à Hindenburg. Avec des idées totalement extrêmes et à l’opposée de la politique habituelle et de démocratie, les idéaux totalitaires se sont frayés un chemin vers le pouvoir.

Cependant, les nazis ne disposent pas encore de la majorité au Reichstag et ne peuvent pas encore gouverner à leur façon, étant tout de même le premier parti du pays. Il reste beaucoup à faire pour le parti nazi.

Le pacte d’acier italo-allemand et la relation Mussolini-Hitler

C’est le 22 mai 1939 que l’Allemagne apporte une dimension européenne a ses actions. Bien conscient de son pouvoir, Hitler souhaite rivaliser avec les alliances occidentales, rallier les mouvements communs et se venger. C’est donc naturellement que l’initiative de ce pacte vient des Allemands. Cependant pour bien comprendre, tournons nous désormais vers Mussolini.

Si on revient un moment en arrière, en 1933, lorsqu’Hitler prend le pouvoir. Ce dernier a été très inspiré par la « Marche sur Rome » de son confrère italien et admire sans se cacher Benito Mussolini, qu’il considère comme un modèle de réussite fasciste en Europe. Mussolini partage avec Hitler des ambitions impérialistes et remet en question, tout comme lui, le Traité de Versailles. Hitler en particulier le dépeint comme une trahison envers ceux qui se sont battus pour l’Allemagne et condamne fermement la République de Weimar de « criminels de Novembre ». Mais après tout, ils ne sont pas si différents.

Idéologie commune

Dans une Europe démocratique et internationaliste, les 2 dictateurs sont frères sur plan idéologique car diamétralement opposé à ce qui est instauré partout. Se rejoignant, ils y voient une opportunité de pouvoir peut être lier une alliance ou combattre côte à côte. Mais rien est encore fait à l’horizon 1933.

Cependant, lors Mussolini rencontre Hitler pour la première fois en 1934, Mussolini est sceptique au premier abord envers Hitler, qu’il trouve faible pour avoir cherché le pouvoir par des moyens légaux, malgré qu’il soit réussi. Il ne pense pas qu’il est un vrai dictateur. Mais de fil en aiguille, leur relation s’améliore à partir de 1936, quand l’Italie envahit l’Éthiopie et se rapproche de l’Allemagne. En 1937, l’Italie quitte la Société Des Nations comme l’a fait 3 ans plus tôt son confrère allemand. Ils sont tous les 2 isolés sur la scène internationale et européenne. Le 28 octobre 1938, von Ribbentrop, Ministre des Affaires Etrangères allemandes se rendit à Rome voire Mussolini et proposa la conclusion d’une alliance, un « pacte d’acier » qui peut également être vu comme un pacte d’amitié et d’alliance germano-italien.

Le 22 mai 1939 à Berlin, ce fameux pacte d’acier fut signé entre l’Italie et l’Allemagne. Par ce lien, le pacte scelle officiellement ce qui se nommera l’union des « Forces de L’Axe ». Mussolini joue gros après la signature, car la destinée de l’Italie se joue sur cette décision de Mussolini de lier son sort à celui d’Hitler.

Mussolini lors de l'opération Eiche

C’est alors le début d’une longue lutte commune qui va perdurer jusqu’à la guerre. un peu plus tard, le 27 septembre 1940, le Japon rejoint les forces de l’Axe par la « Pacte de Berlin », rejoignant l’Italie et l’Allemagne. Comme le pacte d’acier, il s’agit d’un se présente comme un accord de défense commune contre toute puissance non encore engagée dans la guerre.

Malgré une image de pays partageant beaucoup de points communs, les 2 parties se surveillaient et se méfiaient l’un et l’autre, ne s’échangeant en réalité que peu d’éléments officiels mais plutôt superficiels. De plus, Mussolini était également très jaloux d’Hitler et lui portait peu d’affection.

La situation catastrophique de l’Italie en 1943

L’Opération Husky, lancée en juillet 1943, marque un tournant majeur dans la guerre. Plus de 160 000 soldats britanniques, canadiens et américains débarquent sur les côtes siciliennes, ouvrant ainsi un nouveau front en Europe et préparant le terrain pour une invasion de l’Italie. Cette opération n’est pas anodine, car elle permet aux Alliés d’ouvrir un nouveau front en Europe et de pouvoir commencer à remonter vers le continent. La Sicile étant un passage obligé après la réussite de l’Opération Torch de 1942 qui a vu débarquer les Alliés en Afrique, maintenant ils se dirigent vers l’Italie progressivement.

Sauf que cette entrée en Sicile aurait pu se sceller quand, en décembre 1942, Mussolini a perdu tout son apparat de chef et s’est laissé remplacer par son ministre des Affaires étrangères, Ciano, lors de deux conférences avec Hitler à cette époque. Mussolini est mal en point et il sort finalement de son silence de 18 mois le 2 décembre en s’adressant au peuple italien depuis le Palais de Venise. Le 7 avril 1943, lors d’une rencontre à Salzbourg, il tente en vain de convaincre Hitler de négocier un armistice avec les Soviétiques afin de recentrer l’effort de guerre sur les autres fronts. Cet armistice proposé n’est pas retenu et l’Italie est dans une situation très compliquée :

  • L’Italie est liée par un pacte d’acier avec son Allié Allemand qui demande aide et soutient pour cette guerre qui ne fait que s’envenimer.
  • Fasciste et ennemi des Alliés depuis le début de la Seconde Guerre Mondiale, l’Italie a son sort scellé à celui de l’Allemagne et subira pareils représailles en cas de capitulation
  • L’Italie n’est plus qu’un pays fantoche à la main des Allemands qui a besoin de son allié italien pour poursuivre la guerre. L’Italie est en cours de germanisation et les allemands n’ont plus vraiment confiance envers les Italiens pour les offensives conjointes et même pour assurer sa propre sécurité.
  • Depuis le début de la guerre, l’armée italienne n’a pas les capacités offensives qu’Hitler aurait voulu et n’était pas prête pour la guerre. L’Italie n’a que fait subir les décisions de son allié allemand et se voit contraint de composer et de tenter d’endiguer la situation pourtant bien désespérée.

La principale cause de cette situation réside principalement dans le fait que Mussolini ait orienté le pays vers celui d’Hitler. Le roi Victor-Emmanuel III n’a plus confiance en son dictateur et souhaite à tout prix arrêter l’hémorragie tant qu’il est temps et signer un armistice avec les Alliés. Et pour cela, le roi prépare sérieusement son remplacement, en recherchant la paix avec les Alliés.

Mussolini lors de l'opération Eiche
Carte interactive de l’Europe dans la Seconde Guerre mondiale – Année 1943 – Par Matthieu Mugneret

L’ordre du jour Grandi

C’est partant de ce constat qu’une opération est levée par le roi à Dino Grandi, ministre des Affaires Etrangères d’Italie, nommée l’Ordre du jour Grandi. Il s’agit d’une réunion secrète, une audience ayant eu lieu le 24 et 25 juillet 1943 du Grand conseil fasciste visant à destituer Mussolini et le libérer de ses charges gouvernementales. Lors de cette rencontre, le roi propose à Grandi, que conformément au Statut du Royaume d’Italie, un vote du parlement ou du Grand Conseil lui permettant d’obtenir tous les fondements constitutionnels nécessaires pour évincer Mussolini du pouvoir et de reprendre la situation en main par le roi lui même.

C’est à ce moment que pour la première et dernière fois, ce 24 au 25 juillet, il est clairement exposé devant les plus hautes instances du gouvernement fasciste la question de remplacer Mussolini. Ce jour est le début et la fin du dictateur car tout a été réalisé en 25 heures seulement. La séance durera 10 heures dans la grande salle du Palazzo Venezia et fut convoquée par Mussolini lui même en urgence, pour la première fois depuis 1939. Mais ce fut la dernière fois où Mussolini occupera ses fonctions.

Le vote de la destitution de Mussolini

Cette session exceptionnelle du Grand Conseil fasciste et de Mussolini lui même se termine dans les premières heures du 25 juillet avec l’adoption officiel de l’ordre du jour présenté par Dino Grandi plus tôt, qui demande au roi de reprendre les pouvoirs gouvernementaux, entraînant ainsi l’abandon de Mussolini de ses fonctions et sa destitution. Par la suite, il confie qu’il regrettait de ne pas avoir fait arrêter les dix-neuf membres qui l’ont trahi. Ce vote est adopté par les hauts dignitaires du fascisme au nombre de 19 pour, 8 contre et 1 abstenant. Même le gendre de Mussolini Galeazzo Ciano a voté pour.

Cependant, bien que cette décision n’ait qu’une portée symbolique et que le Grand Conseil n’ait aucun moyen de la faire exécuter, elle sert de prétexte constitutionnel à l’action du roi qui a désormais un socle sur quoi se reposer et faire réaliser cette demande.

25 juillet 1943, L’arrestation de Mussolini

Il ne fallut pas plus longtemps, à vrai dire le jour d’après pour que tout se termine. Au beau matin du 25 Juillet 1943, comme à son habitude, Mussolini se rend à son bureau du Palazzo Vennezia avant de solliciter une entrevue anticipée avec le roi, initialement prévue le lendemain à propos de cette réunion du 24. Il obtient un rendez-vous à 17 heures où il se présenta à la Villa Savoia, où le roi Victor-Emmanuel III lui annonce son remplacement par le maréchal Pietro Badoglio, tout en lui assurant une protection contre la colère populaire. Sur ordre royal, Mussolini est immédiatement placé sous escorte, tandis que le bâtiment est encerclé par deux cents carabiniers.

Par cette arrestation, Victor-Emmanuel III cherche avant tout à préserver sa dynastie, menacée d’être perçue comme trop compromise avec le fascisme.

Ensuite, c’est la descente aux affaires pour Mussolini. D’abord détenu dans une caserne de carabiniers à Rome, Mussolini est transféré le 27 juillet sur l’île de Ponza, puis, du 7 au 27 août 1943, sur l’île de La Maddalena. Finalement, sur ordre de Badoglio, il est discrètement transporté à Campo Imperatore, sur le Gran Sasso, à bord d’une ambulance de la Croix-Rouge pour passer inaperçu.

Il est alors assigné à résidence dans une grande bâtisse du mont Gran Sasso dans les Abbruzes. Mussolini n’est donc plus au pouvoir et l’Italie compte bien avec cette destitution changer le sort de l’Italie avec une signature séparée de paix ou un revirement de situation pour se tourner vers les Alliés. C’est la fin du régime fasciste et cela ne va pas plaire du tout à Hitler, qui vient de perdre son plus proche allié en Europe, alors qu’il n’a plus que jamais besoin de soutien et de renforts.

Gouvernement Badoglio

Dès lors, à partir de ce 25 juillet 1943, un nouveau gouvernement est constitué et un certain Pietro Badoglio devient Premier Ministre d’Italie, toujours sous le chef de l’Etat en la qualité du roi Victor-Emmanuel III. Badoglio, militaire émérite, accède au pouvoir et dirige alors le 60ème cabinet d’Italie et va tenter de redresser le pays suite à Mussolini, soutenu par le roi.

Mais l’Italie n’arrête et ne brise pas pour autant l’Alliance de l’Axe. Le gouvernement de Badoglio continua la guerre aux côtés de l’Axe, sachant clairement que les Allemands vont tenter de les soumettre ou de reprendre le contrôle de l’Italie en libérant le fraichement destitué Mussolini. Mais après la défaite des forces italiennes et allemandes lors de l’invasion alliée de la Sicile aux horizons d’Août, Badoglio entama des négociations secrètes derrière le dos des Allemands avec les Alliés en vue d’une reddition prochaine.

Mais les Alliés progressent bien avec la campagne d’Italie et arrivent à remonter vers le centre de l’Europe. L’armistice de Cassibile entre l’Italie et les Alliés est signée le 3 septembre 1943, marquant la capitulation et la fin de parcours de l’Italie aux côtés de l’Allemagne nazie au cours de la Seconde Guerre Mondiale. Dès lors, l’Italie est grignotée progressivement et n’est plus que l’ombre d’un pays sur le point de céder.

En septembre, l’Allemagne ordonne l’opération Achse visant à désarmer volontairement l’Italie afin d’éviter tout renversement plus grave de la situation pour l’Allemagne qui est désormais seule à se battre contre tous, du moins ce qu’il reste, en Europe. Mais un peu plus tard, Hitler voulut reprendre en main la situation et remettre l’Italie dans le chemin de la collaboration car il a désespérément besoin d’aide à l’été 1943.

12 septembre 1943, le grand sauvetage : l’Opération Eiche

L’ambition d’Hitler va être mise à exécution, mais il lui faut un homme à la hauteur et capable de secourir un homme d’Etat, un dictateur, fraîchement destitué et faisant l’objet de profondes représailles dans son pays. Cet homme est le brutal homme de main SS-Obersturmbannführer Otto Skorzeny, son fidèle SS qui eut la tâche de sauver Mussolini d’Italie. Hitler le charge personnellement de cette tâche, preuve de sa grande confiance.

Hitler demande à l’aviation allemande (la Luftwaffe) et à un commando SS d’aider Skorzeny pour organiser son évasion. Cette évasion porte le nom de l’Opération Eiche « chêne » et deviendra mythique. Cette opération comprend du repérage, l’opération de sauvetage et l’exfiltration par les airs, en avion, du commando et de Mussolini.

Skorzeny et Hitler

Repérage pour l’opération, quelques jours avant

Mussolini a changé plusieurs fois de lieux de détention, même si les autorités fascistes savent pertinemment qu’il fait d’ores-et-déjà l’objet de recherches de la part d’Hitler. On estime qu’il était dans une caserne de carabiniers à Rome, puis sur l’île de Ponza et ensuite sur l’île de La Maddalena en Sardaigne.

Otto Skorzeny s’envole donc pour l’Italie pour constituer l’équipe qui l’accompagnera et pour faire du repérage, retrouver la trace de Mussolini et préparer son sauvetage. Ils mirent quelques jours pour trouver ce dernier lieu, qui a donné beaucoup de fils à retordre aux renseignements allemands. Mais le 8 septembre, un message crypté par les services secrets nazis permettent d’avoir plus d’informations sur sa destination et son nouveau lieu de résidence…

D’après eux, il semblerait qu’il soit arrivé plus tard au Gran Sasso, une montagne dans les Abruzzes en Italie. Il est enfermé dans une grande bâtisse avec une vue imprenable, dans l’hôtel des sports d’hiver Campo Imperatore à 2 130 m d’altitude difficilement accessible en voiture. Il est accessible par contre par voie téléphérique et Skorzeny remarque, derrière l’hôtel, une petite prairie en forme de triangle qui semble convenir à un atterrissage. Il émet également l’idée d’un parachutage, mais trop risqué à réaliser.

Bundesarchiv Bild 101I-567-1503A-05, Gran Sasso, Hôtel Campo Imperatore

Mais ce petit bout de terre est considéré comme trop périlleux, le parachutage est finalement écarté au profit de l’utilisation de planeurs d’assaut DFS-230. Il s’agira donc de ne pas monter en téléphérique, mais d’atterrir avec un avion suffisamment petit mais fiable afin de sortir Mussolini et cela jouera toute son importance et ne relèvera pas d’un obstacle important pour le commando.

Une fois tout le repérage et les éléments repérés, Skorzeny enclenche donc quelques jours avant le début des hostilités et de l’opération Eiche.

Mussolini lors de l'opération Eiche
Un DFS 230 de l’Opération Eiche

Les Fallschirmjäger et les moyens mobilisés pour le sauvetage

Le 12 septembre, c’est toute l’organisation poussée par Hitler qui est mobilisée pour sauver Mussolini de sa prison alpine. On peut noter plus de 120 hommes dans cette opération de grande envergure. Les meilleurs troupes ont été sélectionnées devant le secret et l’importance de cette mission pour Hitler et la continuité de la guerre.

On peut découper la mission en 2 groupes : un groupe de parachutistes et Skorzeny dans les planeurs ayant pour mission d’atterrir directement à l’hôtel, neutraliser les défenses et exfiltrer Mussolini, tandis qu’un autre groupe de parachutistes se chargera de couper les communications et les accès au téléphérique en bas du massif pour monter au Campo Impertatore. Le Campo Imperatore sera donc entièrement isolé durant toute l’opération.

  • 82 parachutistes d’élite du FallschirmJäger Regiment 7 contenant le bataillon Fallschirmjäger Lehr qui est considérée comme responsable du succès de la mission
  • 26 soldats de la Waffen-SS et Otto Skorzeny
  • 2 compagnies de parachutistes : La 2 et 3ème compagnie du FallshirmJäger Regiment du Major Mors qui vont se charger des communications et de l’aéroport
  • 10 planeurs DFS 230 remorqués par des Henschel HS 126

Début de l’opération, 13h

L’ensemble des équipages et des planeurs décollent de la base aérienne de Pratica di Mare en direction des Abruzzes. L’opération vient tout juste de débuter et les 10 planeurs ont pour objectif d’atterir à côté de l’hôtel des sports d’hiver Campo Imperatore.

Pendant ce temps, tout en bas du massif, la station inférieure du funiculaire menant au Campo Imperatore fut prise à 14h00 par deux compagnies de parachutistes, lors d’une attaque terrestre du major Mors, commandant en chef du raid. Toutes les lignes téléphoniques furent coupées pour isoler la zone et permettent à Skorzeny, encore en vol, d’atterrir sans permettre aux carabiniers d’avertir qui que ce soit.

Cette offensive entraîna les deux seuls morts de l’opération : le garde forestier italien Pasqualino Vitocco, abattu alors qu’il tentait de prévenir la garnison de l’arrivée des troupes allemandes, et le carabinier Giovanni Natale, tué alors qu’il s’apprêtait à ouvrir le feu. Deux autres carabiniers furent légèrement blessés par une grenade lors de l’accès aux locaux.

Arrivée de Skorzeny au Campo Imperatore, 14h

La voie est libre pour Skorzeny et son commando qui n’ont plus qu’à aller récupérer Mussolini. À 14h05, les commandos aéroportés atterrirent avec dix planeurs DFS 230 sur le plateau montagneux à proximité de l’hôtel. L’un des appareils s’écrasa à l’atterrissage, causant plusieurs blessés et on affirme que seulement 8 arriveront finalement et pourront redécoller. Jusqu’à l’atterrissage, il n’y eut aucune résistance et la libération de Mussolini peut se faire sans contrainte.

Mussolini lors de l'opération Eiche
Bundesarchiv Bild 101I-567-1503B-23, Gran Sasso, Lastensegler, Hôtel Campo Imperatore

Exfiltration de Mussolini, 14h45

Les parachutistes, épaulés par les troupes spéciales de Skorzeny, n’eurent aucun mal à stopper les 200 carabiniers chargés de la garde de Mussolini, sans qu’un seul coup de feu ne soit tiré. Car, dans le planeur de Skorzeny, le général italien Fernando Soleti chargé de cette garnison, emmené de force lors du raid en tant qu’otage, joua un rôle crucial : il s’identifia auprès des gardes de l’hôtel et leur ordonna de ne pas ouvrir le feu.

Skorzeny s’empara ensuite de la salle radio de l’hôtel et neutralisa l’opérateur avant de pénétrer dans l’hôtel, suivi de ses hommes armés, l’opération se déroulait comme prévu. Dix minutes seulement après le début de l’assaut, Mussolini quittait les lieux, escorté par les troupes allemandes en fanfare et les premières caméras allemandes triées sur le volet commençaient à immortaliser le moment.

À 14h45, le major Mors atteignit l’hôtel par le funiculaire et se présenta à Mussolini pour le rencontrer, faisant tout de même également partie de l’opération. Mais il ne faut pas perdre de temps, il est justement l’heure de partir. Otto Skorzeny et le Duce sortent de l’hotel et vont monter dans un Fieseler Fi 156 piloté par le capitaine Gerlach, capable de décoller sur moins de 70 m et de se poser sur 25 m pour être amenés sur l’aérodrome de Pratica di Mare d’où Skorzeny avait décollé il y a moins de 2 heures.

Envol retour vers l’aérodrome Pratica di Mare

Dans ce tout petit avion, Skorzeny, Gerlach et Mussolini sont pris en photo, victorieux, avant même qu’ils ne soient vraiment en sécurité. De plus, l’avion est surchargé par les valises de Mussolini et par la présence de Skorzeny, bien décidé à profiter de son succès, même si ce dernier n’est pas en très bonne santé.

Dès lors, l’opération se termine et Mussolini arrive difficilement à aérodrome de Pratica di Mare, le vol fut très périlleux et compliqué pour le virtuose Gerlach.

Le Duce rencontre Hitler après son évasion

La suite du voyage prévoit que Mussolini passe du temps avec sa famille avant d’aller retrouver son bon samaritain et ami Hitler. Mais ce dernier aurait certainement voulu ne pas être libéré et encore moins avoir à faire à nouveau au gouvernement en place. Alors il se fait discret, avec une grande veste et une tenue noire sobre, bien loin du faste de l’époque.

Mais cela étant fait, ils poursuivirent leur trajet à bord d’un Heinkel He 111 jusqu’à Vienne, où Mussolini passa la nuit à l’hôtel Imperial. Le lendemain, il fut acheminé par avion à Munich, avant de rejoindre, le 14 septembre, le quartier général d’Hitler à la Wolfsschanze en Pologne pour y rencontrer Hitler, qui a d’ailleurs, besoin de lui en Italie.

L’envol lors de l’opération Eiche à bord du fraîchement arrivé Heinkel He 111, avec Mussolini à son bord

Les retombées de l’opération Eiche

Skorzeny fut promu Sturmbannführer et est récompensé de la Croix de Fer pour cet acte de bravoure. Il fut accueilli en héros par la propagande qui ne perdit pas de temps à mettre en avant la nouvelle inédite de la libération du Duce, voir à l’envenimer afin de rendre à nouveau les foules enthousiastes… Mais la guerre se poursuit pour Hitler et Mussolini, qui tentent tant bien que mal de retenir l’avancée alliée qui ne fait que grossir et avancer.

Hitler veut que Mussolini reprenne le gouvernement de l’Italie du Nord afin de continuer le combat, refusant catégoriquement qu’il ne prenne sa retraite. Il gouverne alors l’éphémère République sociale italienne, c’est à dire le retour de l’Etat fasciste en Italie. Son alliance tient encore, mais elle s’arrêtera lors de la dernière destitution de Mussolini le 25 avril 1945, alors qu’il tentait de fuir. Il est capturé puis exécuté avec sa maîtresse Clara Petacci. Ils sont traînés en public avec d’autres fascistes et leurs corps sont ensuite pendus sur la Piazzale Loreto, à Milan…

L’Opération Eiche a certes montré la capacité d’Hitler a mettre en oeuvre des moyens importants pour libérer quelqu’un, il n’a cependant pas permis d’apporter un changement significatif dans la continuité de la guerre et dans la capacité de l’Italie a repousser l’avancée Alliée. On se souvient de cette acte qui ne servit finalement qu’à galvaniser la propagande saturée par les défaites sur le front qui ne font que pleuvoir et à tenter de faire oublier l’inévitable.

Sources

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